Les jardiniers du bonheur & la guerre

Balançoire au-dessus de la jungle

🌱 " Notre vie est ce qu'en font nos pensées" 🌱

Marc-Aurèle 

Louis, un grand-père de 87 ans passe une grande partie de ses journées dans son coin de paradis : un potager aux mille couleurs qu’il entretient avec soin et amour depuis bientôt 60 ans. Un beau jour de printemps, il est heureux de la visite de Chloé, une de ses petites filles âgée de 28 ans avec laquelle il partage de nombreux échanges passionnants sur la nature, les plantes, les voyages… Complices, ils jardinent ou refont parfois le monde. 

 

Louis : « Bonjour ma chérie. Je suis heureux de ta visite. Comment vas-tu? »

 

Chloé : « Bonjour Papilou. Cela me fait plaisir de te voir en forme. Pour être franche avec toi, je ne vais pas très bien. Je suis angoissée et j’ai vraiment peur avec tout ce qui se passe aujourd’hui. »

 

L : « Ce qui se passe à quel niveau exactement ? Il y a tellement d’événements qui se bousculent ces dernières années. »

 

C : « Tu sais bien Papilou. La guerre en Ukraine. »

 

Louis pose calmement sa bêche sur la palissade en bois et regarde avec attention sa petite fille qui semble être plus dans ses pensées qu’à son habitude.

 

L : « Ah oui j’en ai entendu parler, mais tu sais je ne regarde plus la télévision depuis des années. Viens nous allons nous asseoir. Et tu vas me raconter ce qui te fait peur exactement. »

 

Louis montre le banc adossé contre le muret et tous deux s’installent sous le doux soleil du printemps.

 

C : « J’ai une peur grandissante depuis quelques semaines. J’ai peur que des milliers de personnes meurent. J’ai peur aussi qu’un jour cette guerre se rapproche. Il y a plein d’images horribles qui se bousculent dans ma tête. »

 

L : « Ok je comprends Chloé. J’aimerais connaître l’intensité de ta peur. Tu vois cette échelle posée contre le mur. Il y a 10 barreaux. Entre 0 et 10 à quel niveau se situe ta peur. Est-elle plutôt en bas de l’échelle, au milieu, en haut ? »

 

C : « C’est marrant Papilou comme tu arrives toujours à m’expliquer ou à me faire comprendre les choses à partir de ce qui nous entoure. Bon et bien je dirais que ma peur est presqu’en haut de l’échelle, au 8ème échelon. »

 

L : « Ok ta peur est vraiment très forte alors. Si tu es d’accord, je te propose que tu tournes ton regard vers ce qui se passe en toi. »

 

Chloé sur un ton un peu agacé : « Ce qui se passe en moi ? C’est-à-dire ? Je te parle de ce qui se passe en Ukraine pas de ce qui se passe en moi ! »

 

L : « Oui, j’entends bien, mais en ce moment même nous n’avons pas vraiment de grand pouvoir d’action pour changer ce qui se passe en Ukraine même si nous aimerions beaucoup que ce pays retrouve la paix. Tu me dis que tu as peur. La peur c’est une émotion que tu ressens là maintenant en toi. Et ça c’est important de ne pas mettre un couvercle dessus. La peur ou le stress quand ils durent longtemps ne sont pas bons pour notre corps et notre santé. Alors si c’est ok pour toi, fais comme moi, prends un instant pour bien poser tes pieds sur le sol et respire profondément. » Louis montre l’exemple en posant ses pieds bien à plat sur la terre et en prenant trois grandes respirations. Sa petite fille s’installe confortablement, redresse un peu son dos et respire à plein poumons.

 

L : « Ferme un instant les yeux et observe ce qui se passe à l’intérieur de toi. Où ressens-tu la peur dans ton corps ? Est-ce dans ton ventre, au niveau du cœur, de ta gorge… ?»

 

C : « Ok, Papilou. Je la ressens dans mon ventre comme une boule assez grosse. Je la ressens aussi un peu dans la gorge. » dit Chloé en montrant simultanément les parties de son corps où elle ressent des sensations liées à la peur.

 

L : « Je te propose un petit exercice. Tu vois autour de nous le jardin que nous sommes en train de préparer pour le printemps. » Louis joint le geste à la parole en montrant avec sa canne le potager, la serre, le parterre de roses et le massif de fleurs mellifères. « Dans ce jardin, il y a toutes sortes de plantes et d’herbes. Je t’invite à observer cette peur et à commencer par l’accueillir. Elle fait en quelque sorte partie de ton monde intérieur en cet instant un peu comme chacune des plantes autour de nous fait partie du jardin. » Louis pointe ensuite un coin du potager où un petit chardon des champs a commencé à pousser.

 

L : « Tu vois ce chardon Chloé. Supposons que je ne vois pas cette « mauvaise herbe », que je passe tous les jours devant sans vraiment la regarder et que sans m’en rendre compte je l’arrose régulièrement au même titre que les fleurs que j’ai envie de voir pousser. Que va-t-il se passer selon toi ? »

 

C : « Et bien j’imagine que ce chardon va grandir et prendre de plus en plus de place. Peut-être que les fleurs à côté n’auront plus suffisamment d’espace, d’eau et de lumière pour grandir. Et que d’autres chardons pousseront peu à peu et envahiront ton beau jardin comme le font les ronces dans une maison abandonnée. » 

 

L : « C’est exact Chloé. Et la peur que tu ressens c’est un peu comme ce qui se passe dans un potager. Si tu ne prends pas le temps de la regarder, de l’accueillir, tu ne seras pas vraiment consciente de ce que tu dois faire de cette peur. Et si en plus tu la nourris, tu l’arroses quotidiennement sans t’en rendre compte, elle va augmenter d’intensité. Une inquiétude pourra ainsi devenir une crainte puis une peur puis une angoisse de plus en plus forte. Si tu résistes ou si tu nies la peur, elle va grandir.

 

Ce que tu peux faire, c’est ce que je fais dans notre petit potager en permaculture : je prends une pause, je m’assieds et j’observe ce qu’il y a dans mon jardin avant de décider ce que je garde et ce que j’arrache. J’enlève uniquement ce qui risque de nuire aux fleurs, aux légumes… que j’ai envie de voir s’épanouir. Alors ta peur elle est un peu comme ce chardon. A la base c’était une graine. Une graine a été semée dans ton esprit. Des pensées sont apparues et ont commencé à prendre de plus en plus de place. Ces pensées ont nourri ta peur tout comme si tu avais arrosé la graine de chardon chaque jour sans t’en rendre compte. Peux-tu observer les pensées en toi qui nourrissent cette peur ?»

 

C : « Oui je pense à des maisons qui se font bombarder, à des familles qui courent pour échapper aux bombes, à des enfants cachés dans des caves qui pleurent… Il y a des tas d’images qui s’enchaînent et avec elle de la peur, mais aussi de la tristesse, de la colère… »

 

L : « Ces images les as-tu déjà vues dans la réalité ? »

 

C : « Non mais j’en ai vu dans les films ou à la TV. »

 

L : « Ok. Voyons maintenant qu’elle est la graine de cette peur que tu ressens. Qu’est-ce qui a déclenché en premier cette peur. Te souviens-tu du moment précis où la peur est apparue ? »

C : « Je crois qu’il y avait déjà des peurs avant, mais je me souviens d’un moment précis. Je regardais le journal télévisé. Et il y a eu les images des maisons bombardées et les commentaires du journaliste. Cela a vraiment activé une peur importante en moi. »

 

L : « Et après ces images qu’est-ce qui s’est passé dans ton monde intérieur ? »

 

C : « Il y a plein d’autres images qui sont venues. Cela a créé des pensées. »

 

L : « Ces pensées sont-elles là en ce moment? »

 

C : « Oui et je n’arrive pas à les stopper. »

 

L : « Pose-toi un instant pour faire un petit exercice. Imagine que ces images et ces pensées ne sont plus dans ta tête. Comment est-ce que tu te sens sans ces pensées ? Observe si ton corps est plus détendu ? »

 

C : « S’il n’y a pas ces pensées, je me sens plus sereine et apaisée. »

 

L : « Ok c’est super Chloé. Tu as pu trouver une des racines de la peur que tu ressens depuis quelques jours. Ces images violentes ont provoqué en toi des pensées et ce sont en fait ces pensées qui tournent parfois en boucle dans ta tête qui génèrent la peur que tu ressens. C’est comme si tu avais enfin vu le chardon dans ce potager. Maintenant que tu as accueilli la peur, que tu l’as observée, que veux-tu faire avec les pensées qui déclenchent cette peur ? Souhaites-tu les arroser ou pas ? »  

 

C : « Clairement non ! »

 

L : « Si ta peur est déclenchée par des pensées, des images qui la nourrissent, que peux-tu faire si tu ne veux pas qu’elle continue à grandir? »

 

 

C : « Arrêter de l’arroser ! Alors je comprends bien le principe pour la mauvaise herbe dans le jardin, mais concrètement comment je fais pour mes pensées dans ma tête? C’est plus complexe que de désherber un jardin, non ? » 

 

L : « Tu observes tes pensées un peu comme si tu observais le ciel. Si tu vois que ce sont des pensées qui nourrissent la peur en toi, tu les laisses juste passer un peu comme des nuages noirs qui passent dans le ciel. Tes pensées ou ces images pourront revenir dans ta tête mais, tu les verras cette fois et tu pourras donc choisir de les laisser passer et de ne pas t’y accrocher. »

 

C : « Ok j’ai compris. Et est-ce possible d’agir avant cela ? Comment faire pour avoir moins d’images et de pensées sombres qui apparaissent dans mon esprit ? »

 

L : « Réfléchis : où as-tu vu ces images en premier ? Tu m’as dit que c’était au JT. Penses-tu que c’est une bonne idée de regarder toutes ces infos négatives ? Crois-tu que cela reflète la réalité ? »

 

C : « Je ne comprends pas où tu veux en venir précisément. Papi, tu ne serais pas un peu complotiste sur les bords ? Tu es en train de me dire que ce qu’on voit à la TV est faux ? »

 

L : « Je ne dis pas que tout est faux, mais tout n’est pas vrai non plus. Je t’inviterais en tous cas à pratiquer le cinquième accord toltèque face aux informations Sois sceptique & apprends à écouter. [1] Cela te permettra de faire progressivement preuve de plus de discernement. Avant cela, je peux t’affirmer une chose: les médias ne traduisent pas notre réalité. Dans les JT ou journaux, il y a près de 90 % d’infos négatives tout comme nos pensées d’ailleurs. Or, il n’y a pas 90% de faits négatifs dans le monde. Il y a des tas de belles initiatives, des actions positives, des personnes inspirantes… partout sur la planète. Seulement voilà les médias, les films, les émissions transmettent surtout des infos qui déclenchent la peur, la division, la colère… Cela nourrit l’inconscient collectif et peut se traduire quelques temps après par des réactions violentes dans la réalité. 

 

Ce qui se passe dans le jardin intérieur de chaque personne est semblable à cela. Si la majorité des êtres humains ont des pensées désagréables voire sombres qui tournent en boucle dans leur inconscient cela va avoir un impact sur leurs émotions, leurs façons de s’exprimer, leurs actions… Toute guerre débute par un contexte de plusieurs années de climat de peur, d’insécurité… au niveau de notre mental. Si les personnes vivent mentalement plusieurs années dans la peur, elles pourront avoir des comportements qu’elles n’auraient jamais eus en temps normal.

  

Je sais de quoi je parle, rappelle-toi j’ai vécu la seconde guerre mondiale. Les années qui ont précédé celle-ci, la population était volontairement maintenue dans la peur par certains qui savaient très bien ce qu’ils faisaient : peur de l’autre, peur des juifs, peur des communistes, peur des tziganes, peur des résistants (appelés parfois à ce moment-là des terroristes avant de devenir des héros des décennies plus tard)… Tu as vu tout cela à l’école dans tes cours d’histoire et de sciences humaines.

 

Si tu souhaites la paix pour le monde, commence par cultiver la paix en toi, prends soin de ton jardin intérieur, n’y laisse pas les plantes que tu ne veux pas voir envahir tout l’espace au détriment des fleurs et de tout ce qui te met en joie. Si tu sèmes des tomates, tu récolteras des tomates, si tu sèmes des ronces tu récolteras des ronces.

 

 

Plus il y aura de personnes comme toi et moi qui cultiveront leur jardin intérieur, qui laisseront passer les pensées sombres, qui seront attentives et conscientes à ce qui se passe en eux, qui écouteront et accueilleront chacune de leurs émotions comme de précieuses messagères, plus la paix sera présente. Plus tu resteras en PAIX intérieurement, plus le RESPECT (RESTE EN PAIX) sera présent en toi et autour de toi. C’est depuis cet espace là que nous pouvons ensuite poser en conscience des actions justes et constructives pour nous, pour les autres et pour la nature. »

 

C : « Merci Papy. Je me sens beaucoup plus calme après notre échange. Je comprends pourquoi je me sens si bien quand je viens t’aider ou te rendre visite dans ce potager. Tu n’y cultives pas que des plantes en fait ! Tu es un jardinier du bonheur. » 

Stéphanie Oeyen - Acteurs positifs © Tous droits réservés 

 

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Sources & pistes pour aller plus loin : 

[1] Don Miguel Ruiz & Don José Ruiz, Le cinquième accord toltèque, Jouvence, 2020.  

 

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